27 novembre 2016

Lèse-Blaise : (9) Impression, soleil couchant

Résumé des épisodes précédents :

  • 5 novembre : Presse Océan décerne un carton rouge à Jean Blaise pour avoir déclaré à Paris Normandie qu’il voulait faire du Havre « la star de l’année 2017 ».
  • 8 novembre : « je n’ai jamais dit que Le Havre serait la star de l’année 2017 en France mais la star de l’événement que je prépare pour 2017 », rétorque Jean Blaise (au risque de confirmer une fois de plus qu’il est très capable de nier l’évidence).
  • 21 novembre : Presse Océan publie une double page où Jean Blaise s’autoglorifie à son aise ; oublié le carton rouge !
  • 22 novembre : La Méforme d’une ville se gausse de cette figure de vaudeville.
L’histoire ne s’arrête pas là. Hier, 26 novembre, dans sa rubrique « Les off de la semaine », Presse Océan a derechef épinglé Jean Blaise pour avoir « prédit la mort des musées » dans un entretien avec Médiapart. Ce qui n’est pas du meilleur goût alors que s’achève la rénovation du musée des Beaux-arts.

Mais la déclaration de Jean Blaise date en réalité d’une émission Contrechamp animée par Joseph Confavreux et Joy Sorman en avril 2016. La Méforme d’une ville lui avait fait écho le 22 octobre. Pourquoi la faire connaître aujourd’hui ? Sans doute parce que le temps presse : Johanna Rolland vient d’annoncer que le Musée d’arts de Nantes ouvrirait ses portes le 23 juin 2017.

Il reste moins de sept mois pour préparer l’inauguration. Pour le tourisme nantais, ce sera l’événement de l’année. Et même celui de la décennie (on y reviendra sous peu). Le Voyage à Nantes va devoir fournir un sacré coup de collier. Mais à quoi bon se donner du mal si les musées sont promis à une mort certaine ? Jean Blaise aurait pu trouver mieux pour motiver ses troupes. Et pour se motiver lui-même. Car il a déjà la tête ailleurs : comme rappelé ci-dessus, il dirige les préparatifs du 500e anniversaire de la ville du Havre.

Se rendre de Nantes au Havre
prend déjà une demi-journée
Intitulées « Un été au Havre 2017 », ces festivités concurrenceront évidemment la manifestation estivale du Voyage à Nantes. Mais surtout, elles vont accaparer le temps et l’attention du patron du tourisme nantais. Le Havre a prévu un dispositif énorme : on ne claque pas 20 millions d’euros en claquant des doigts. Jean Blaise va être très occupé et le sera de plus en plus en se rapprochant de la date inaugurale, le 27 mai. Quatre semaines avant l’ouverture du musée d’arts de Nantes ! Au moment où il devrait être en train de mettre la dernière main à une opération capitale pour Nantes, il sera accaparé par une opération capitale pour Le Havre. Il devra trahir l’une des deux villes.

Jean Blaise jure avoir accepté le poste havrais avec l’accord de Johanna Rolland. La responsabilité de cet énorme pataquès serait donc partagée. Mais cette mise en cause de madame le maire de Nantes n’est pas d’une suprême habileté. Nantes ne peut se permettre de rater l’ouverture de son nouveau musée. Or les résultats très moyens des dernières éditions du Voyage à Nantes n’incitent déjà pas à l’optimisme. Madame le maire de Nantes est-elle prête à endosser d’avance la co-responsabilité d’un demi-échec ?

Illustrations : copie partielle d'écran d'une vidéo de l'émission Contrechamp sur YouTube, copie partielle d'écran du site www.voyages-sncf.com

24 novembre 2016

Hôtels de passe-passe pour le Voyage à Nantes

De quoi j’ai l’air ? À peine avais-je critiqué incidemment, mardi, les chiffres de la taxe de séjour allégués par Jean Blaise dans une interview à Presse Océan, lundi, qu’ils étaient confirmés* par un communiqué du Voyage à Nantes. Communiqué aussitôt repris par la presse. « Le tourisme estival progresse dans la métropole », titrait Ouest France, qui commentait : « Nantes deviendrait-elle une ville touristique ? Certains chiffres sont révélateurs, surtout l'été. Le nombre de nuitées marchandes, 521 489 les deux mois d'été, reste sur une pente ascendante. »

Devais-je me couvrir la tête de cendres ? Retirer mon article ? M’excuser publiquement ? Pas avant d’avoir examiné la question d’un peu plus près ! Et là, pas besoin de chercher longtemps. Voici la première page du dernier numéro d’Insee Flash Pays de la Loire :


En somme, tout stagne, sauf les hôtels. Mais Le Voyage à Nantes ne parle que des hôtels, et tant pis si la fréquentation baisse dans les autres types d’hébergement, en particulier les campings (moins 3,8 % en Loire-Atlantique). Sa présentation tient du jeu de bonneteau : Où est la fréquentation touristique ? Ah ! elle était sous le gobelet « hôtels » ! Encore gagné !

Et puis, même pour les hôtels, les chiffres avancés par Le Voyage à Nantes méritent qu'on les regarde d’un peu plus près. Les 521.489 nuitées hôtelières revendiquées représentent bien une augmentation de 4,9 % par rapport à l’été 2015. Mais en quoi cette augmentation signalerait-elle un succès particulier des animations estivales nantaises ? En Mayenne, la progression est de 10,2 %, et Le Voyage à Nantes n’y est pour rien. Pour la Loire-Atlantique dans son ensemble, elle est de 4,6 %. Avec ses 4,9 %, Nantes ne se distingue guère ; l’écart de 0,3  % représente moins de 1.500 nuitées.

Moins de touristes à Nantes, très probablement

Et puis, il n'y a pas que des touristes dans les hôtels nantais. La clientèle d’affaires a fortement progressé dans la région (+ 17,5 % de nuitées) et « représente la moitié des nuitées hôtelières de la région », précise l’Insee. Il est probable que cette augmentation a surtout porté sur les grandes villes. « De nombreux touristes et séminaristes se sont reportés sur Nantes en raison du contexte terroriste à Paris ou sur la Côte d’Azur » confirme Jean-François Dauchel, président du Club hôtelier de Nantes, interrogé par Frédéric Brenon dans 20 Minutes. La conséquence est claire : si la clientèle d’affaires a progressé bien davantage que la fréquentation générale… c’est que la fréquentation touristique a sensiblement baissé. En titrant « Le tourisme estival progresse dans la métropole », Ouest France est à côté de la plaque.

Et puis, comment se fait-il que la taxe de séjour ne progresse, à en croire Le Voyage à Nantes, que de 6,6 % en juillet et 2,6 % en août ? Comme Nantes Métropole l’a très fortement alourdie en 2016, son montant devrait augmenter bien plus que la fréquentation. Peut-être trouve-t-on un début d’explication dans ce que disait Jean-François Dauchel à 20 Minutes : « Des effectifs policiers importants, sollicités pour les manifestations contre la loi Travail, ont également rempli les hôtels de la métropole. Et puis, il faut savoir que l’État loge de plus en plus de demandeurs d’asile en attente d’hébergement. Dans certains établissements, ils occupent les trois quarts des chambres. » Un demandeur d’asile qui séjourne dans un hôtel pendant trois mois équivaut à lui seul à trente touristes qui y passent trois nuits ! Or les hébergements d’urgence sont exonérés de taxe de séjour : ceci explique peut-être cela…

Et puis, il n’y a pas que Le Voyage à Nantes pour attirer des touristes à Nantes. Le bilan 2016 de La Loire à Vélo n’est pas encore connu, mais il semble que son succès perdure. Et si les chiffres nantais de juillet sont meilleurs que ceux d’août, cela pourrait tenir un peu à la Maker Faire organisée aux Machines de l’île – pour laquelle les contribuables métropolitains ont versé 150.000 euros de subvention.

Conclusion : une fois de plus, Le Voyage à Nantes a sollicité les chiffres abusivement. Ils ne révèlent pas un succès touristique particulier en 2016, mais au mieux une stagnation et probablement une régression.
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* Ou presque. Jean Blaise avait évoqué une progression de la taxe hôtelière de 6,8 % en juillet et de 2,8 % en août ; il fallait lire 6,6 % et 2,6 %, corrige le V.A.N.

22 novembre 2016

Lèse-Blaise : (8) Jean Blaise toujours présent à Nantes – Presse Océan n‘y échappe pas

On ne devrait jamais quitter Nantes. À peine a-t-on a le dos tourné que des complots s’ourdissent, que des manants chuchotent, que des plumitifs se rebiffent. Témoin la mésaventure dont Jean Blaise a été victime le 5 novembre : Presse Océan lui a décerné un « carton rouge » en dix-sept lignes sur une seule colonne. Il y était accusé de « faire quelques infidélités à la cité des ducs de Bretagne » car il travaille pour Le Havre dont il veut faire « la star de l’année 2017 » à l’occasion de son 500e anniversaire.

Il fallait laver l’affront. Dès le mardi suivant paraissait dans Presse Océan une sorte de droit de réponse en dix-neuf lignes. Le grand homme avait « tenu à préciser son propos » en ces termes : « Je n’ai jamais dit que Le Havre serait la star de l’année 2017 en France mais la star de l’événement que je prépare pour 2017 ». Pour qui s’intéresserait à ce débat quasi homérique, il suffit de se reporter à l’article de Paris Normandie cité par Presse Océan le 5 novembre. « L’objectif est que Le Havre soit la star de l’année 2017 », y déclarait Jean Blaise – un point c’est tout.

Cet acte de contrition n’était pas suffisant : le 21 novembre, en guise de pénitence et d’hommage, Presse Océan a dû déposer une double page aux pieds de Jean Blaise. Ce dernier y déploie à sa guise deux de ses talents principaux, l’autosatisfaction et la langue de bois. Et cela dès la première question : « Quel bilan tirez-vous du Voyage à Nantes l’été dernier ? ». Réponse : « J’avais très peur. Nous avions des travaux partout dans la ville. Malgré cela, le tourisme a progressé. La taxe de séjour a encore augmenté : 6,8 % en juillet, 2,8 % en août. »

Le présent blog a plusieurs fois dénoncé les bilans bidonnés du Voyage à Nantes. On ne va pas louper cette nouvelle occasion. Car Jean Blaise omet de rappeler qu’en 2016 Nantes Métropole a fortement augmenté le montant de la taxe de séjour ‑ de 104,5 % pour les hôtels quatre étoiles, de 53 % pour les trois étoiles, etc. Pire : depuis le 1er août, Airbnb prélève une taxe de séjour pour le compte de la ville. Cette taxe de séjour qui a « encore augmenté » dénote donc une fréquentation en baisse.

Emmanuel Vautier, auteur de l’interview, ne l’ignorait sûrement pas. Il a préféré éviter le détail qui fâche. Mais il s’est quand même offert une petite insolence. Comme Jean Blaise évoque la rémunération de son travail au Havre, une note de bas de page complète : « Montant non-communiqué ».

Retrouvez la série « Lèse-Blaise » :

14 novembre 2016

Nantes et la Loire (15) : propos blasphématoires sur Julien Gracq

Ce qui suit est un blasphème mûrement médité. Philippe Le Guillou et autres gracquophiles bretons, ne vous en offusquez pas : rien de personnel là-dedans. Le titre de ce blog rend hommage à Julien Gracq, bien sûr, et s'il en prend aussi le contrepied, c'est pour défendre la ville, non pour dénigrer l'auteur.

Du temps où il était maire de Nantes, Jean-Marc Ayrault distribuait volontiers La Forme d’une ville* à ses visiteurs. Longtemps je m’en suis étonné, tant le style aristocratique de l’écrivain tranchait avec la raideur petite-bourgeoise de l’édile. Mais à bien y réfléchir, ce choix n’était pas si étonnant.

Julien Gracq n’a pas compris grand chose à Nantes. Juste retour des choses, Jean-Marc Ayrault n’a probablement pas compris grand chose à Julien Gracq. Du moins ne l’a-t-il pas lu avec assez d’attention**. Une seule fois il l’a cité dans son blog, en 2009, reprenant le discours de ses vingt ans de mandat, qu’il n’avait pas nécessairement écrit lui-même. Il ne semble pas conscient que La Forme d’une ville n’est pas une description de Nantes mais la « représentation » que s’en fait un adolescent, pensionnaire du lycée Clemenceau.

Gracq le dit dès la première page. Et il y revient ainsi à la dernière : « Ville qu’à travers ces images emblématiques aucun repère n’ancre en moi dans le passé à une date fixe, parce qu’elle n’a donné lieu à aucun lien, à aucun attachement privé, à rien d’autre qu’à une poussée annexionniste du moi presque abstraite, à l’énorme boulimie acquisitive et prospective qui règne sur une vie entre onze et dix-huit ans. » Arrivé à Nantes à 18 ans, Jean-Marc Ayrault n’y a même pas vécu cette « boulimie acquisitive ».

La Loire de Nantes n’est pas celle de Saint-Florent

Comme partout dans l’œuvre de Gracq, les métaphores aquatiques abondent dans La Forme d’une ville. Mais elles évoquent plus souvent le ruisseau ou l’étang, voire la flaque, que le fleuve ou l’océan, sauf rares exceptions (la chapelle du lycée est « perchée comme le château arrière d’un trois-ponts*** à l’ancre »…). Elles culminent avec cette vision (p. 42) : « L’image de Nantes qui lève spontanément dans mon esprit (…) est celle d’un nœud mal serré de radiales divergentes, au long desquelles le fluide urbain fuit et se dilue dans la campagne. » Le liquide gracquien est rural.

Même dans Au château d’Argol, paradoxalement, l’océan (que Gracq appelle plutôt « la mer » ou « le golfe ») semble un décor plaqué. La fameuse scène du bain, dans laquelle Heide, Herminien et Albert nagent vers le large jusqu’à l’épuisement, est aquatique bien sûr, mais guère océanique. Le roman décrit des « étendues liquides et éternellement vides », une « mer plate », de « longs reflets mouillés », un « dos liquide ». « Il semblait à Albert que l’eau véritablement coulât sous eux », écrit même Gracq – une sensation qui appartient au baigneur de la Loire plutôt qu'à celui de l’Atlantique.

La Loire est peu présente dans La Forme d’une ville et ne l’est qu’en termes négatifs (« les eaux glaireuses du bras de Pirmil », « un fleuve inanimé »…). Gracq s’étend plus volontiers sur la Chézine, le Cens, l’Erdre. S’il décrit une promenade à Pont-Rousseau, il fait « halte le long de la Sèvre ». S’il pousse jusqu’à Saint-Sébastien, il voit « s’allonger déjà au bord de la rive sud les boires sommeillantes, les îles à fourrés de saules, qui m’étaient familières à St-Florent ».

Imperméables à l’onde de marée

Saint-Florent : tout est là ! Ce que voit de Nantes le jeune Louis Poirier exilé et pensionnaire est avant tout ce qui lui rappelle « la campagne de (sa) petite enfance »****. À la Loire, il préfère l’Evre, mince rivière qu’il chantera dans Les Eaux étroites – dont le titre dit bien qu’on n’y respire pas l’air du large. La Forme d’une ville est un texte d’angevin, écrit à l’eau douce. Le p’tit gars de Maulévrier qu’est Jean-Marc Ayrault a pu s’y retrouver aisément.

Saint-Florent-le-Vieil se dresse au bord de la Loire, bien entendu. Mais cette Loire n’est pas la nôtre. Le bourg paisible se trouve hors de portée de l’onde de marée, l'inversion du courant provoquée par le flux de l'océan. « Cette onde de marée, remontant la Loire toutes les douze heures, aurait-elle une influence sur notre inconscient, sur notre psychisme…? » demandait un jour Nantes c’est du gâteau. Cela ne fait aucun doute ! Nantes est une ville d’estuaire, l’Atlantique y est chez lui et cela change tout – au point qu’il faudrait rebaptiser le fleuve en aval de Varades.

En tant que maire de Nantes, Jean-Marc Ayrault a entrepris une seule action d’envergure à l’égard de la Loire. Elle mériterait une psychanalyse : il l’a enfermée derrière des garde-fous au Hangar à bananes et tout au long du quai de la Fosse. Cet Angevin a trop lu Julien Gracq et pas assez Jules Verne.
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* Julien Gracq, La Forme d’une ville, Paris, Librairie José Corti, 1985. 
** Un indice : il a longtemps laissé subsister sur le site web de la mairie de Nantes une présentation générale de la ville qui évoquait « la flèche de la cathédrale témoin des temps anciens ». Julien Gracq, plus observateur, avait décrit « la cathédrale sans flèches ni tours, engluée dans les maisons comme une baleine échouée ».
*** Le dernier trois-ponts français, vaisseau de haut bord à trois rangées de canons, est apparemment le Valmy, déconstruit en 1891, dix-neuf ans avant la naissance de Julien Gracq. On ignore pareillement où et quand ce dernier a observé la « baleine échouée » de la note précédente.
**** C’est peut-être pour cela qu'il n’a « visité la cathédrale, pour y voir le tombeau de François II, qu’à vingt-cinq ans, et le château de Nantes (…) jamais. »

09 novembre 2016

Lobbying pour NDDL (39) : L’anti-trumpisme primaire au service du projet d’aéroport

L'Institut d'études avancées dirigé par M. Supiot est
agréablement logé par les contribuables dans le nouveau
quartier Marcel-Saupin
M. Alain Supiot est professeur au Collège de France et président de l’Institut d’études avancées, un machin destiné à recevoir à Nantes des intellectuels « bien pensants » et financé par les contribuables (sa construction a déjà coûté 16 millions d’euros). Il a accueilli en résidence, par exemple, le professeur Massimo Amato, père spirituel de la SoNantes, qui elle-même est en train de nous coûter très cher – mais c’est une autre histoire.

M. Supiot, qu’on a connu beaucoup plus à gauche, a publié sur le site du Figaro une tribune sur « le grand délitement de la démocratie ». Et franchement, c’est n’importe quoi. Voici ce qu’on y lit :

« Pressé de dire s'il reconnaîtrait l'éventuelle victoire de sa concurrente Hillary Clinton, M. Donald Trump a répondu “J’accepterai sans réserve les résultats de cette élection présidentielle — si je gagne”. (…) Les Européens auraient tort de moquer cette déclaration d'apparence bouffonne, car elle témoigne d'un délitement de la démocratie dont nul pays n'est exempt. »

Hélas, la bouffonnerie est du côté du digne professeur. En effet, trois hypothèses se présentent :
a) il ne comprend pas l’anglais ;
b) il n’a pas écouté la déclaration du candidat et a seulement lu dans le New York Times une phrase coupée de son contexte ;
c) il bidonne délibérément en se disant que ses lecteurs n’iront pas vérifier ses propos.

Car voici exactement ce qu’a déclaré Donald Trump le 20 octobre :
« I will totally accept the results of this great and historic presidential election ‑ if I win. Of course, I would accept a clear election result but I would also reserve my right to contest or file a legal challenge in the case of a questionable result. Right ? And always I will follow and abide by all the rules and traditions of all of the many candidates who have come before me, always. »

Ce qui signifie à peu près :
« J’accepterai sans réserve les résultats de cette magnifique et historique élection présidentielle – si je gagne. Bien entendu, j’accepterais le résultat s’il est clair, mais je réserve aussi mon droit de le contester ou de l’attaquer en justice s’il est douteux. D’accord ? Et toujours je suivrai et je me conformerai aux règles et traditions des nombreux candidats qui se sont présentés avant moi, toujours. »

Donald Trump est un homme de spectacle, animateur d’émissions de télévision. La première phrase de ce passage est une accroche pour mettre le public en appétit. Elle ne signifie ABSOLUMENT PAS que Donald Trump prévoyait de contester le résultat en toute hypothèse s’il ne gagnait pas. Au contraire, il dit expressément qu’il acceptera un résultat clair… et qu’il contestera un résultat douteux, ce qui est la moindre des choses, non ? Toutes les démocraties, y compris en France et aux États-Unis, prévoient des recours contre les irrégularités électorales. Le candidat démocrate Al Gore y a eu recours en 2000. M. Trump a simplement refusé de se lier les mains par avance comme on l’y invitait. Rien de plus normal.

Volontaire ou involontaire, ce bidonnage est pour M. Supiot le prétexte d’un rapprochement acrobatique avec les débats autour de Notre-Dame-des-Landes. Je passe sur les détails : inutile de décortiquer une comparaison dont l’un des termes est si clairement faussé.

Cependant, une remarque s’impose.

M. Supiot écrit : « le Président de la République a, au terme d'années d'atermoiements, solennellement annoncé en février 2016 que la question serait tranchée par un référendum local. A sa surprise probablement, à celle sûrement d'une classe médiatique ayant unanimement soutenu les adversaires du projet, ce dernier fut approuvé par 55% des électeurs du département concerné. » Apparemment, il lui a échappé que le scrutin du 26 juin n’était pas le « référendum local » annoncé par le président de la République. C'était une « consultation locale », type de scrutin nouveau concocté en vitesse par Manuel Valls.

Comme son nom l’indique, cette consultation était consultative et non décisionnelle ainsi que l’aurait été un référendum. Pour un juriste, la différence est capitale. M. Supiot est juriste. Ce professeur au Collège de France parle doctement d'un sujet dont il avoue ignorer un pan essentiel !

05 novembre 2016

Lobbying pour NDDL (38) : la manif’ de trop est celle des partisans

Convoquer une manifestation en faveur du projet de Notre-Dame-des-Landes  moins d’un mois après celle de ses adversaires, c’était ambitieux, mais il ne fallait pas se louper.

Le résultat est clair : si les opposants ont réuni entre 15 000 et 40 000 personnes en pleine campagne le 8 octobre, les partisans en ont rassemblé 200 à tout casser (cent fois moins !) en plein centre-ville, devant la préfecture, ce 5 novembre. Ceux-là même qui réclament le début des travaux viennent de démontrer brillamment que l’envie d’aéroport pèse fort peu en regard du refus de l’aéroport.

Et à vrai dire, c’était couru. Quelle mouche avait donc piqué Alain Mustière et autres hérauts du projet de Vinci Airports ? Étaient-ils éblouis par le projet au point de croire que des dizaines de milliers de gens étaient prêts à le défendre dans la rue ? On a eu tout à l'heure une illustration cocasse de la faible mobilisation des partisans : quand un petit contingent d'une quinzaine d’opposants au projet a été signalé, un tiers des « manifestants » se sont aussitôt volatilisés.

Ou bien fallait-il liquider d’urgence le matériel de propagande qu’une décision de la cour d’appel administrative pourrait rendre obsolète pour de bon lundi prochain ? Les organisateurs n’avaient pas lésiné sur les cartons de déménagement déposés devant la préfecture et censés contenir les 270.000 bulletins de vote « oui » du 26 juin. Mais chacun a pu voir que ces cartons trimballés à bout de bras n’étaient pleins que de vide. Cette manifestation sentait le baroud d’honneur.


P.S. du 6 novembre : Qui donc exagère ?

« 300 personnes se sont rassemblées devant la préfecture », assure aujourd’hui la Une de Presse Océan. « Près de 300 manifestants », corrige (à peine) Virginie Meillerais en pages intérieures. Trois cents, ça n’est déjà pas beaucoup ! Mais c’est quand même plus que la réalité. Afin que les choses soient claires, voici une vue générale de la manifestation, prise à 10 h 10 (la manifestation débutait à 10 h 00). La photo ci-dessus a été prise à 10 h 22. Mais ils sont où, les 300 ? On voit que le nombre réel de manifestants est plutôt de l'ordre de 150 (en indiquant 200 à la louche, j'étais généreux !). Et moins encore si l'on en déduit les journalistes, les policiers en civil et les simples badauds. 


03 novembre 2016

Bolopoly (34) : où en est l’exponentielle SoNantes à mi-année ?

D’accord, j’avais une vision particulièrement pessimiste de la SoNantes et de son avenir en me penchant sur la monnaie complémentaire nantaise, le 22 avril dernier : les adhésions d’entreprises étaient très en retard sur les prévisions, les perspectives d’équilibrage des comptes étaient hypothétiques, le montant moyen des transactions ne dépassait pas 24 euros et chacune d’elles coûtait à peu près dix fois ce montant !

La SoNantes fêtait quelques jours plus tard son premier anniversaire. Ses responsables affichaient alors un optimisme inoxydable : ça irait bien mieux dans les mois suivants. « Les monnaies locales affichent généralement une croissance exponentielle la deuxième année », assuraient-ils sur le site de Nantes Métropole. « Nous y sommes, il ne faut pas rater cet envol ».

Six mois se sont écoulés depuis lors. À mi-année, où en est-on de cette « croissance exponentielle » ? Fin avril, la SoNantaise, association animatrice de la SoNantes, revendiquait 160 entreprises adhérentes. On en est aujourd’hui à 178. Soit dix-huit nouveaux adhérents en vingt-six semaines. Pour mémoire, Larousse définit ainsi l’adjectif « exponentiel » : « Qui a une croissance rapide et continue ».

La fin octobre 2016 ne marque pas seulement le milieu de cette année de croissance exponentielle. C’est aussi le milieu du délai au terme duquel la SoNantes doit atteindre l’équilibre financier. La promesse est de Pascal Bolo, adjoint au maire de Nantes, vice-président de Nantes Métropole et président du conseil de surveillance de SoNao, la société de gestion de la SoNantes. Il l’a formulée lors du conseil municipal du 19 décembre 2014 : « Le plan d’affaire qui a été monté prévoit un équilibre en trois ans sur la base de 10 % des entreprises nantaises adhérant au système ». Ce qui signifie à peu près 3.000 entreprises. Courage, il ne reste que 2.822 adhérents à trouver en un an et demi.

C’est possible ! Il suffit de multiplier par 52 le rythme des adhésions. En voilà de l’exponentiel !