12 février 2015

Nantes et la Loire (7) : Tribune Loire

Deuxième contribution au Grand débat

La Loire à Nantes, on sait qu’elle est là mais on ne la voit pas tellement, ou alors derrière des barrières. Voici bien longtemps, la municipalité Ayrault avait fait grand cas de l’aménagement d’une promenade le long de la voie sur berge. Le piéton qui s’y aventure aujourd’hui depuis le pont Général-Audibert se heurte vite à un panneau d’interdiction doublé d’un épais fourré. Et nulle part ou presque on ne peut toucher la Loire du doigt. Dans les ports, autrefois, des cales assuraient la transition entre l’eau et la terme ferme ; elles rendaient l’onde familière. Il ne nous reste aujourd’hui que les deux grandes cales des Chantiers au pied de la grue Titan jaune, excentrées et pas très gratifiantes.
 Il nous faudrait un endroit à la gloire de la Loire, un lieu de rencontres et de réjouissances au contact du fleuve. On l’imagine comme un amphithéâtre descendant vers une petite rade, où les Nantais viendraient se promener, se rencontrer, manifester, pique-niquer aux beaux jours, assister parfois à des spectacles flottants. À marée montante, on évacuerait les gradins inférieurs. Au jusant, on les réinvestirait.

Cette Tribune Loire devrait être toute proche du centre-ville. On pourrait lui sacrifier une partie du parking de la Petite-Hollande, face à la médiathèque. Ou, mieux encore, l’aménager sur l’île de Nantes. Un emplacement s’impose alors : celui du palais de justice. La place est occupée ? Oui, et alors ? Faisons place nette !

Moche et massif, le palais de justice verrouille visuellement la perspective entre l’île de Nantes et le centre-ville. Pour accéder au quartier de la création, il faut d'abord contourner ce symbole de lourdeur et de rigidité. Sa destruction libérerait la vue et les esprits ‑ et sanctionnerait solennellement, comme une peine capitale, les erreurs de conception et les malfaçons à cause desquelles il menace ruine en permanence. La Tribune Loire donnerait au quartier de la création le forum dont il va avoir besoin pour exister collectivement ; elle deviendrait vite le centre vital où architectes, graphistes, vidéastes, communicants et autres artistes fertiliseraient mutuellement leurs idées. Considérée comme une emmerdeuse tout au long de l’ère Ayrault, la Loire redeviendrait enfin une inspiratrice !

3 commentaires:

  1. en dehors de vos appréciations architecturales dont l'intérêt se limite à des jugements sans autre qualité que ceux de tout un chacun. Certes votre blog vous permet de nous faire connaître vos goûts.
    La loire a principalement inspiré la fuite, pour Jules Verne mais aussi dans la devise que la ville a retenu depuis 1816 ""Favet Neptunus Eunti". Stendhal raconte sa descente en bateau " Mes regards cherchaient avec avidité ces aspects tellement vantés des bords de la Loire, je ne voyais que de petits peupliers et des saules, pas un arbre de soixante pieds de haut,..." Laissons à Julien Gracq le soin de conclure : Il y a cependant dans le Nantes d'aujourd'hui une ligne de fracture, le long de laquelle la forte cohésion du gâteau urbain, à peine craquelé par les fentes étroites de ses rues, qui en fait pour moi vraiment une ville, et non un échantillonnage monumental, se rompt, et intercale dans sa substance une cicatrice mal refermée, une béance que la vie n'a pas colmatée tout à fait : le double lit comblé des bras de la Loire, de part et d'autre de l'ancienne île Feydeau.

    Julien Gracq
    in La Forme d'une ville

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  2. Oh ! Leblanchet, ce n'est pas à vous que j'apprendrai que "eunti" évoque le voyage et non la fuite. Ire et fugere ne sont pas synonymes. Par ailleurs, ce n'est pas la Loire qui a inspiré la devise de Nantes puisque Neptune, comme Poséidon, est le dieu des océans et non des rivières.
    Enfin (je ne vous épargnerai rien), le passage de Stendhal que vous citez décrit la Touraine et non la Loire nantaise ; à Nantes, au contraire, Stendhal a vu "des ormes de soixante pieds de haut", ha !

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  3. Vous conviendrez qu'il y a des voyages qui couvrent des fuites. Mais bien entendu, il s'agit de voyage et de Neptune, mais la Loire se "jette" dans la mer tout de même. J'ai certes distordu le sens de la devise mais respecté l'esprit.

    Bon, je reconnais la aussi une localisation qui servait mon propos qui répondait à votre phrase : la Loire redeviendrait une inspiratrice.

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