23 septembre 2014

Carré Feydeau : comment arrondir les angles ?

Proudreed est bien intégré à la culture municipale nantaise : faute de réaliser, on communique. Le propriétaire des surfaces commerciales du Carré Feydeau n’a pas réussi à louer ses locaux avant la fin de l’été comme promis. Alors, il a retouché ses affiches : plus question d’une « ouverture été 2014 », les commerces ouvriront seulement « bientôt », voire plus tard, sinon à la saint Glinglin, façon réouverture du musée des Beaux-arts ou décisions de Jean-Marc Ayrault.

On ne voudrait pas être à la place des commerciaux chargés de louer les emplacements. Le Carré Feydeau n’est pas organisé en galerie commerciale : les magasins sont situés sur son pourtour. Pour faire du lèche-vitrines, il faudra tourner autour de ce parallélépipède planté au milieu d’un espace trop dégagé. On n’aura jamais le sentiment de foule dont le marketing enseigne qu’il fait partie de l’expérience vécue par l’acheteur. Pas question de crébillonner.

Or les boutiques disponibles dans le centre de Nantes ne manquent pas, et les nouveaux passages en travaux (Pommeraye) et en projet (Châtelaine) viendront bientôt accroître la concurrence. En commentaire au précédent billet, Leblanchet appelait judicieusement à l’installation au Carré Feydeau d’un Tailleur pour dames et d’un Hôtel du libre-échange. Hélas, le sort de l’immeuble évoque plutôt Chat en poche, Un fil à la patte ou La main passe
Avant
Après

09 septembre 2014

Carré Feydeau : la quadrature du cercle vicieux

Il reste deux semaines au Carré Feydeau pour tenir la promesse toujours affichée sur ses murs : quinze nouveaux commerces ouverts à l’été 2014. Le 23 septembre, l’été 2014 sera fini. Or ces ouvertures ne se présentent pas bien. Le propriétaire des murs vante encore une offre commerciale « nécessairement complémentaire » à celle du centre-ville. Mais le centre-ville souffre déjà. Y ajouter d’un coup 13.000 m² d’offre « complémentaire », dont 5.700 m² en sous-sol, relève plus du hasard que de la nécessité.

Oh ! tout était merveilleusement pensé. Un « pôle efficacité », alias une grande surface alimentaire, doit rameuter les foules, épaulée par un « pôle original » axé sur le services, les loisirs, la détente, le bien-être, une « offre généraliste de complément » comprenant des « enseignes singulières non présentes en centre-ville » et un « pôle de restauration différenciant par rapport à l’offre du centre ville ».

Il faut croire qu’on manque d’original, de singulier et de différenciant (c’est « original », les salons de beauté ? c’est « différenciant » les kebabs ?). Carrefour Market est si pressé de venir que Proudreed, propriétaire des murs, l’a traîné devant les tribunaux. Les marques de luxe lorgnent plutôt les 3.500 m² de la nouvelle galerie du passage Pommeraye. Saturn, racheté par Boulanger, s’est défaussé. Apple a préféré Atlantis. Même Burger King semble avoir renoncé. Personne ne veut venir parce qu’il n’y a personne. Fruit d’une « collaboration exemplaire entre Vinci Immobilier et la Ville de Nantes », le Carré Feydeau illustre surtout le flou stratégique de la municipalité nantaise du temps de Jean-Marc Ayrault.

En réalité, la réussite la plus flagrante des nombreux mandats de Jean-Marc Ayrault est la zone commerciale d’Atlantis, qu’il a inaugurée en 1987 en tant que maire de Saint-Herblain. Bon, l’idée n’était même pas de lui mais de son prédécesseur, Michel Chauty. Cependant, il aura fait de son mieux pour assurer son développement avec le prolongement de la ligne 1 du tramway en 2000 et un plan de circulation qui cadenasse le centre ville. Jean-Marc Ayrault est parti, son héritage demeure.

07 septembre 2014

Ange de Loire


Sur les grilles de la passerelle des Victimes de la Terreur de Nantes*, le nombre des cadenas d’amour croît doucement. On en compte à présent une dizaine. Et un nouveau type d’ex voto vient de faire son apparition. Moins gai, celui-là.
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* Cette passerelle métallique qui passe sous le pont Anne de Bretagne n’a pas de nom à ma connaissance. « Passerelle des Victimes de la Terreur de Nantes » conviendrait parfaitement. Les « baignades républicaines » et autres « déportations verticales », c'est-à-dire les noyades de prisonniers ordonnées par Carrier en 1794, ont été pratiquées à ce niveau.

 

05 septembre 2014

Le Voyage à Nantes 2014 (6) : sublime, forcément sublime

Pour la presse régionale, le mois de septembre ramène toujours ses « marronniers ». La rentrée des classes. Les travaux en ville. Les nouveaux horaires de la TAN. Et le glorieux bilan du VAN. En 2014, ça ne change pas : Cocorico ! « Même si deux millions de visites, cela ne veut rien dire », selon ses propos rapportés par Philippe Corbou dans Presse Océan ce 5 septembre, Jean Blaise le dit quand même…

Reste à savoir ce qu’on compte. « Le seul chiffre important est que l’on augmente les visites de 500.000 unités », dit encore Jean Blaise. Comme on compte plusieurs fois les mêmes visiteurs, au château, place du Bouffay, au jardin des plantes, etc., toute variation des « unités » peut dénoter en fait une variation du nombre de compteurs. Et, comme par le passé, rien ne permet de distinguer touristes et simples passants. Ces deux derniers mois, j’ai traversé au moins soixante fois l’un ou l’autre des trois lieux cités plus haut : pour combien d’unités suis-je inscrit dans les chiffres du Voyage à Nantes ?

Il y a des endroits où les comptages sont moins discutables. Le Nid, par exemple : on ne monte pas par hasard en haut de la tour Bretagne. Bilan 2013 : 113.000 visiteurs. Bilan 2014 : 107.161.

Cela dit, à vu de nez, on a croisé cet été à Nantes bien plus de touristes étrangers que les années précédentes. Un succès du Voyage à Nantes ? Ou plutôt un succès des politiques de rigueur menées en Espagne et au Royaume-Uni ? En tout cas, ceux qui voient un peu plus loin que le bout de la rue Crucy savent que toute la Bretagne a connu une bonne saison touristique 2014. Et pas seulement la Bretagne. Bordeaux a annoncé une forte augmentation du taux d’occupation de ses hôtels de milieu et haut de gamme en juillet. Le parc du Puy du Fou et le Futuroscope ont attiré respectivement 15 % et 17 % de visiteurs en plus cette année. Et là, le comptage est indiscutable : ce sont des gens qui paient.

Évidemment, rien ne permet de dire si la fréquentation touristique aurait été identique ou inférieure (voire supérieure, qui sait ?) sans les machins semés de-ci, de-là par le Voyage à Nantes. Les comparaisons incitent au moins à la modestie. Mais si Jean Blaise a un talent, c’est de savoir tirer la couverture à soi.
Certains ont quand même un peu de mal à s'émerveiller

01 septembre 2014

Nantes twingomorrhisée ?


Modestement logés au Radisson, les journalistes essaient la nouvelle Twingo 3 à Nantes. Six cents spécialistes de l’automobile vont défiler par groupes de quarante. On ignore ce que la ville a accordé au constructeur pour obtenir ce privilège. Face à d’autres candidates, au nombre desquelles, paraît-il, Bordeaux, Montpellier et Copenhague, elle a en tout cas déroulé le tapis rouge.

Superbe coup de com’ pour Nantes ? Pas si sûr ! Certes, on a pu voir la ville sous un beau jour dans un film déjà signalé ici. Mais cette élégante vidéo de Guillaume Lomprez est restée confidentielle. Et l’on se demande à présent si elle n’était pas un leurre à l’intention des journalistes et des Nantais.

En effet, la campagne télévisée en faveur du nouveau modèle, autrement massive, vient de démarrer. Elle raconte une histoire différente. Dans un film d’animation de deux minutes réalisé par Olivier Kuntzel et Florence Deygas, on voit la Twingo se jouer adroitement d’une ville plutôt hostile – une ville symbolisée par des immeubles massifs, de la pluie, des grues et des éléphants habités… Il y a même un serpent géant qui finit aplati : réminiscence de l’exposition Huang Yong Ping à la Hab Galerie ?

On se demande donc si le choix d’une ville en proie aux embouteillages de la rentrée, handicapée par le retard de certains chantiers (le pont de La Motte Rouge a rouvert de justesse pour les Rendez-vous de l’Erdre avec une dizaine de jours de retard), est vraiment un cadeau. Le message est clair : « en avance sur la ville », la Twingo est adaptée aux pires conditions urbaines.

Cerise empoisonnée sur ce gâteau amer, le slogan choisi par Renault pour son nouveau modèle construit en Slovénie est « Go anywhere, go everywhere » -- allez n’importe où, allez partout. N'importe où ? Voilà un qualificatif peu aimable pour une ville qui s’est montrée si obligeante.