29 août 2013

Ces cadenas qui narguent le Mémorial

Comme on le notait ici lors de l’inauguration du Mémorial de l’abolition de l’esclavage, le monument a manqué entre autres occasions celle des cadenas accrochés par les amants aux rambardes des ponts. Le Mémorial comme lieu d’éternels serments… il y aurait eu une jolie tradition à créer, et beaucoup de place pour la faire durer si les barreaux de sa rambarde n’avaient été aussi épais.

Mais rien n’arrête ceux qui s’aiment. Ils ont traversé la Loire et ont jeté leur dévolu sur la promenade qui entoure le socle du pilier sud du pont transbordeur. « Là où il y a un besoin, il y a un chemin », aurait pu dire Guillaume d’Orange s’il avait été professionnel du marketing et non prince. Tant pis pour le Mémorial.

27 août 2013

Nantes Passion décolle à pleins tubes avec l’Aéroflorale mais se plante sur les platanes

« La cité du nord de l’Allemagne a réservé un accueil chaleureux à l’Aéroflorale II », lit-on p. 59 du dernier Nantes Passion à propos de l’étape de la serre « volante » de François Delarozière à Hambourg. Le magazine municipal a été distribué dans les boîtes aux lettres ces derniers jours. Compte tenu de ses délais de transport (il est imprimé à Laval), de fabrication, de mise en page et de validation politique, il a été rédigé au mieux fin juillet. Soit un mois avant le séjour de l’Aéroflorale II à Hambourg, du 22 au 25 août... Il y a un mot pour cela : bidonnage. Comme une quelconque feuille de chou (on a les capitales vertes qu'on peut), Nantes Passion fait passer le storytelling avant la réalité.

Cela dit, écrire ses articles à l’avance a parfois des inconvénients. « Nous nous sommes intéressés à l’étude de la vigne mariée et des platanes, arbre remarquable et particulièrement résistant à la pollution urbaine » fait dire Nantes Passion au commandant FD après l’étape de l’Aéflorale à Turin au mois de mai. Hélas, cette remarque est devenue politiquement incorrecte entretemps : début août, la ville de Nantes a ratiboisé les platanes du boulevard de la Prairie au Duc pour les remplacer par d’autres essences !

20 août 2013

La pérennité c’est long, surtout vers la fin

Les jardins flottants installés sur l'Erdre face à la préfecture étaient destinés à devenir pérennes. On l’avait appris de bonne source, dans Presse Océan (qui le tenait de Pierre Orefice) et sur le site web de Nantes Métropole :

Nantes Métropole était si sûre de cette pérennité qu’elle avait lancé sur son site ad hoc un appel d’offres pour trouver un exploitant de la buvette, pérenne elle aussi. Là, pas de conditionnel : « le bateau lavoir et les aménagements végétaux sur le bassin et les quais [ont] vocation à rester plusieurs années », y lisait-on.
Ainsi qu’on l’avait dit ici, on y croyait modérément, pour des raisons juridiques. Or voilà que ces jardins pérennes ont disparu :
Fallait-il faire le ménage en vue des journées de l’Erdre ? Remettra-t-on les jardins en place à l’automne ? Ce serait un curieux gaspillage des deniers publics. Mais à ce jour, rien ne l’indique. D’ailleurs, le ménage n’a pas été fait seulement sur l’Erdre : la page web du site de Nantes Métropole n’est plus accessible (mais on note son adresse originale  : http://www.nantesmetropole.fr/actualite/l-actualite-thematique/les-jardins-flottants-reverdissent-sur-l-erdre-developpement-durable-59971.kjsp), et l'on ne trouve plus trace d’une recherche d’un tenancier de buvette parmi les appels d’offres.

14 août 2013

La ville de tous les possibles, même le n'importe quoi

Jean-Marc Ayrault n’est pas amateur de Breton, sauf s’il se prénomme André. Le pape (ou l’ayatollah) du surréalisme nous est donc servi réchauffé chaque fois que l'occasion se présente. « "Ville de tous les possibles" pour André Breton », lit-on ainsi à propos de Nantes à la première ligne du Projet 2030 évoqué hier ici-même. Bon, André Breton n’a jamais dit ça, mais on comprend l’idée.

Après cette pseudo-citation, le Projet 2030 explique combien la ville était sur une mauvaise pente avant l’ère miraculeuse qui s'est ouverte à la fin des années 1980. « Durant toute la première partie du XXème siècle Nantes s’est, en quelque sorte, rétractée », y lit-on. En particulier, elle avait « négligé la formation de ses jeunes gens » ‑ comme si la création d’une université, dans la France centralisée de la IIIème République, n’était pas du seul ressort de l’État.

Mais au fait, quand André Breton a-t-il connu cette ville de tous les possibles ? En 1915, en pleine période « rétractée », justement*. Il y a fait des études de médecine. Oui, Nantes avait une faculté de médecine depuis le temps des ducs de Bretagne. Et cette ville qui négligeait la formation de ses jeunes gens avait créé en 1900 l’École supérieure de commerce de Nantes, future Audencia. L’Institut polytechnique de l’Ouest, future ENSM puis École centrale de Nantes, suivrait en 1919. Plusieurs écoles, collèges et lycées nantais ont aussi été construits ou reconstruits à cette époque. Tiens, justement, André Breton a fait office d'infirmier dans les locaux encore inachevés du futur lycée Guist'hau, provisoirement transformés en hôpital militaire.

Finalement, la rétraction avait du bon. Ou alors, peut-être qu’il arrive à Nantes Métropole de préférer le storytelling à la réalité ? C’est la com’ de tous les possibles pour la ville de tous les gullibles**.
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* La phrase authentique de Breton (« Nantes : peut-être avec Paris la seule ville de France où j’ai l’impression que peut m’arriver quelque chose qui en vaut la peine ») est parue dans Nadja en 1928 – toujours en pleine rétraction.
** De l'anglais gull, gogo, naïf.

13 août 2013

Nantes en 2030, la France en 2025 : les marges se resserrent pour Jean-Marc Ayrault

Nos ministres sont partis en congés avec des devoirs de vacances : ils doivent plancher sur le thème « La France de 2025 ». Parler de l’avenir à long terme pour faire oublier le présent est une figure élémentaire du marketing politique : on reconnaît bien dans cette France de 2025 la patte de Jean-Marc Ayrault. Ce dernier venait de nous faire le coup à Nantes avec « Ma ville demain », qui portait sur l'horizon 2030.

Cette opération, lancée en décembre 2010  pour inviter les habitants à donner leurs idées à une municipalité qui sans doute en manquait un peu, s’est étalée sur deux années entières. Des moyens considérables lui ont été consacrés – équipe dédiée, lieux d’exposition, campagne d’affichage, site web spécial, édition de livrets… Derrière les cocoricos convenus, le résultat a été mince : pour « plus d’une centaine de rencontres, débats, ateliers, conférences » organisés dans toute l’agglomération, « plus de 12.000 personnes ont participé », soit la proportion énorme de 2 % des habitants. Moins de 700 commentaires ont été recueillis, soit même pas un par jour. Ce nombre ne signifie d’ailleurs pas 700 participants puisque de nombreux intervenants ont soumis plusieurs commentaires ; une soixantaine de ceux-ci ont d’ailleurs été mis en ligne par l’équipe Ma ville demain elle-même. À la louche, le nombre de vrais participants ne doit pas dépasser 500, soit moins d’un habitant de l’agglomération sur mille ! Il va sans dire que le nombre de commentaires constructifs est bien inférieur.

La consultation a abouti à la rédaction d’un Projet 2030 qui se voulait un « projet collectif largement partagé ». Comme il est d’usage, le document dégouline de bons sentiments et d’optimisme béat : l’agglomération nantaise de 2030 sera dynamique, apaisée, cohérente, respirante, apprenante, excellente, le centre-ville et les quartiers concilieront animation et qualité de vie, etc. Ah ! et puis, « l’accessibilité internationale sera singulièrement améliorée avec la mise en service de l’aéroport du Grand-ouest », ce qui est un mauvais départ pour le « projet collectif largement partagé » puisque des dizaine de critiques du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, parfois très acerbes ont été enregistrées (si ces commentaires contrariants ont été oubliés par le Projet, l’équipe de Ma ville demain les a honnêtement laissés sur son site web).

Bref, tout pouvait être dit dès décembre 2010, et même bien avant. La ville aurait pu faire l’économie de toute cette affaire ; à la place des ministres, on irait bronzer sans trop se casser la tête.

12 août 2013

Hôtel de la Duchesse Anne : après les déboires, Giboire ?

Se pourrait-il que l’hôtel de la Duchesse Anne soit réhabilité avant de s’effondrer ? En ruine depuis l’incendie de juin 2004, voici neuf ans et deux mois, le bâtiment inspire les plus vives inquiétudes. Et, pour une ville à ambitions touristiques, cette carcasse face au château fait plutôt mauvais genre.

Plus d’une fois on a cru qu’enfin les édiles nantais allaient faire quelque chose. En septembre 2011, Jean-Marc Ayrault avait écrit une lettre aux propriétaires « pour leur demander de bouger », grand déploiement d’énergie resté hélas sans résultat. « On s’achemine vers une sortie de crise », avait à son tour assuré Rachel Bocher, adjointe au maire chargée du tourisme, début avril 2012, ce qui ne fait jamais que seize mois.

Un promoteur vient enfin d’accrocher sur la façade un panneau disant : « Ici, le Groupe Giboire investit pour la préservation du patrimoine ». Oh ! Le Groupe Giboire ne s’engage pas trop, il annonce seulement des « travaux de sécurisation des façades ». Difficile de sécuriser autre chose, d’ailleurs, puisque seules les façades sont encore debout. Pourtant, allez savoir pourquoi, ce geste d’une entreprise privée inspire davantage confiance que les mouvements de menton du maire de Nantes et de son adjointe.

07 août 2013

Nantes, capitale verte : (8) à quoi ça sert que Dantec il se décarcasse ?

Même si les candidats étaient peu nombreux*, obtenir le prix Green Capital 2013 n’a pas été une simple formalité. Il a fallu un « travail intense pour élaborer un rapport détaillé de 200 pages » avant de subir « un grand oral crucial », expliquait le sénateur Ronan Dantec, vice-président de Nantes Métropole. La procédure a duré toute l’année 2010. Nantes, qui a préparé son dossier en 2009, a disposé de plus de trois ans avant de devenir formellement capitale verte de l’Europe en novembre dernier. C'était bien assez pour se préparer à exploiter au mieux cette distinction éphémère qui devait la placer au centre des attentions européennes.
 
« Dans ce but, l’année 2013 a été organisée à Nantes et dans la métropole** en associant les forces vives qui ont un rôle à jouer pour contribuer à l’émergence de la ville durable de demain », annonçaient ensemble Patrick Rimbert et Gilles Retière dans une plaquette intitulée Le Goût de l’avenir, éditée pour célébrer l’événement. « Le projet est collectif, mobilisant les acteurs à tous les niveaux : la Commission européenne, les villes, les institutions locales, les acteurs socio-économiques et les grandes entreprises, les associations et l’ensemble des services des communes de l’agglomération et de Nantes Métropole et, bien sûr, les habitants. »

Tout ça pour ça ? Les trois quarts de l’année Green Capital sont déjà écoulés (elle va de novembre à novembre), et l’on n’a pas vu grand chose. Aucun concept fort n'a structuré la communication autour du label, qui n'a jamais décollé. 

D’après les statistiques de Google Trends, « Nantes green capital » a soulevé un bref mouvement d’intérêt qui a culminé en mai puis a reculé en juin et juillet. Le volume des recherches est si faible que Google ne peut ni les décomposer semaine par semaine, ni les ventiler géographiquement. Les coûteux séjours de l'Aérospatiale à Bruxelles, Turin et bientôt Hambourg n'ont pas eu de grands effets. En VF, les résultats ne sont guère meilleurs : « Nantes capitale verte » n’attire pas plus d’intérêt en juillet 2013 qu’en novembre 2012 ; là encore, aucune répartition géographique n'est possible.

À Nantes même, le prix Green Capital ne semble spontanément associé, et encore, qu’aux sacs de chantier pleins d’herbes folles disséminés ça et là, et qui connotent plus les friches urbaines que l’écologie. Certes, beaucoup de bonnes volontés se sont manifestées et le programme officiel énumère des manifestations nombreuses, mais souvent sans rapport avec le prix Green Capital et qui auraient eu lieu de toute façon, prix ou pas. Et surtout, aucune n’a de vraie visibilité propre. Même le programme officiel Nantes 2013 european green capital met en exergue… Le Voyage à Nantes.

Le phénomène est exactement le même que l'an dernier : Estuaire 2012 avait disparu derrière Le Voyage à Nantes. Il ne faut pas courir deux lièvres à la fois. Organiser deux manifestations à la fois, c’était une de trop. Voire deux.
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* Dix-sept villes ont candidaté à l’un des deux prix Green Capital 2012 et 2013 : Nantes, Barcelone, Malmö, Nuremberg, Reykjavik, Vitoria-Gasteiz, Anvers, Bologne, Budapest, Espoo, Glasgow, Lodz, Ljubljana, Murcie, Rome, Séville et Torun. Vitoria-Gasteiz a obtenu le prix pour 2012, Nantes pour 2013.
** Comme on l'a déjà noté, la métropole était pourtant exclue formellement de la compétition.

L’intégrale de Nantes, capitale verte :

05 août 2013

Les Machines de l’île vues de Moscou

Les efforts de promotion internationale de Nantes Tourisme ne sont pas très fructueux à ce jour. Serait-ce le signe d’une éclaircie ? La première chaîne de télévision russe a diffusé ce soir un reportage sur les Machines de l’île ! Sûr que les touristes des bords de la  Volga vont débarquer en foule dans les prochains jours !

01 août 2013

Royal de luxe ne compte pas sur les cotisations de ses adhérents

Mieux vaut tard que jamais : Royal de Luxe s’est décidé récemment à publier ses comptes au Journal officiel, ainsi que la loi l’y oblige. On peut ainsi savoir combien au juste la troupe a coûté aux contribuables l’an dernier. .
Voici la douloureuse :
  • Ministère de la culture : 305.000,00 €
  • Région : 61.728,97 €
  • Nantes : 1.080.373,83 €
  • Mécénat du Crédit Mutuel :12.500,00 €  
Total des subventions en 2012 : 1.459.602,80 euros. .
Les subventions de la ville de Nantes comprennent 300.000 euros de base annuelle, 500.000 euros d’aide à la création du western Rue de la chute et 280.373,83 euros d’aide à la diffusion du même. Pour environ 18.200 personnes qui ont vu le spectacle à Nantes. Aux subventions de la ville, il faut aussi ajouter la mise à disposition de la Porte Saint-Pierre et de vaste locaux à Chantenay pour un total annuel évalué par la ville à 109.522 euros.
Les subventions de la région incluent un petit mystère : elles sont libellées « Liverpool-Montréal » à hauteur de 46.728,97 euros. Mais si Royal de Luxe est bien allé à Liverpool, il n’a pas visité Montréal.
Les endroits réellement visités par Royal de Luxe (le western Rue de la chute a été montré à Nantes, Anvers, Paris, Aurillac, etc.) ont aussi craché au bassinet. Pour ses prestations, la troupe a perçu près d’un million d’euros en 2012 (contre moins de 100.000 euros en 2011).
En bonne association loi de 1901, Royal de Luxe a aussi encaissé les cotisations de ses membres : 3,00 (trois) euros en 2012. Ce qui signale sans doute une chute drastique du nombre d’adhérents, puisque les cotisations avaient rapporté 6,00 euros en 2011 !
Malgré l’effondrement des cotisations, la troupe conserve un solide matelas financier : ses disponibilités s’élèvent à 529.363,44 euros.
Enfin, on s’interroge évidemment sur les salaires de la troupe. Pour 34,77 salariés en équivalent plein temps, dont 3,41 cadres (on admire la précision comptable), le total des salaires, hors charges sociales, s’élève à 1.104.619,82 euros. La moyenne est facile à calculer. Sans être délirante, elle est quand même supérieure d’un bon quart au salaire moyen du secteur privé (et proche du revenu moyen des fonctionnaires). Il est probable, même si les comptes publiés n'en disent rien, que certains des salariés jouissent du statut d'intermittents du spectacle, ce qui leur vaudrait aussi de recevoir des indemnités de chômage quand la troupe ne joue pas.

On note aussi que, dans les dépenses de la troupe, le poste « autres services extérieurs », qui comprend les commissions aux intermédiaires, la publicité, les frais de transport et les frais de mission, pèse tout de même 304.493,38 euros.