29 novembre 2010

Nantes, c'est loin, vu de Guadalajara

Les Mexicains ont payé des millions pour avoir Royal de Luxe ? Peu importe, après tout, l’essentiel n’est-il pas que la gloire de Nantes (et de son maire) s’étende jusqu'aux Amériques ? Car si Nantes rémunère la troupe de Jean-Luc Courcoult, c’est en principe pour s'acheter une stature culturelle internationale.

Hélas, les retombées dans la presse mexicaine ne sont pas à la hauteur des géants. D'abord, elles sont à peine plus nombreuses que dans la presse française. Mais surtout, si elles ont bien relayé la communication de Royal de Luxe en détaillant le scénario du spectacle, c’était en présentant la troupe simplement comme une empresa francesa. Le nom de Nantes n’a presque jamais été prononcé.

De toute façon, la manifestation ne paraît pas avoir passionné les Mexicains, qui ont sans doute d’autres chats à fouetter. Google Trends ne révèle aucune augmentation significative des recherches sur « Royal de Luxe ». Les requêtes en langue espagnole, peu nombreuses, viennent moins du Mexique que du Chili, visité par la troupe en début d'année. La foule était davantage « emplie de bonheur » que de curiosité.

28 novembre 2010

Encore plus luxueux au Mexique qu'à Nantes

Vingt-quatre degrés à l’ombre : il faisait meilleur à Guadalajara qu’à Nantes ce dimanche. Loin des frimas, Jean-Marc Ayrault visitait la Perla del Occidente pour assister à la clôture des six jours de spectacle qu’y donnait (façon de parler, on le verra plus bas) Royal de Luxe. « De tous les spectacles organisés au Mexique à l'occasion du bicentenaire de l'indépendance et du centenaire de la révolution, c'est de très loin le record de popularité, beaucoup de gens disent merci et la foule immense est emplie de bonheur », a-t-il déclaré, selon Presse Océan.

Allons bon, voilà que le maire de Nantes se met à parler comme Pierre Orefice ! Est-ce une garantie d’objectivité ? Regardons-y de plus près.

D'après le compte rendu d’Impreso – par ailleurs louangeur quant au spectacle lui-même – les spectateurs n’étaient que 8.000 samedi. Soit 0,2 % des habitants de cette agglomération de plus de 4 millions d’habitants.  En revanche, selon El Sol de Mexico, le spectacle de dimanche aurait été vu par 500.000 personnes ; le comptage des manifestants n'est pas une science plus exacte au Mexique qu'en France. Les photos mises en ligne sur Flickr donnent tout de même l'impression que la foule immense emplie de bonheur était plutôt clairsemée.

Le spectacle des géants de Royal de Luxe avait été délocalisé à Guadalajara, deuxième ville du Mexique, parce que Mexico n’en voulait pas. Par crainte des embouteillages, paraît-il. Guadalajara n’y a pas échappé : la fermeture des rues du centre ville a provoqué d'immenses encombrements. Mais ce qui fait tache est en réalité le coût exorbitant du spectacle, révélé par le site d’informations La Silla Rota : 88.667.360 pesos hors taxes, soit l’équivalent de 5.354.637 euros, versés à Royal de Luxe par l’organisme officiel chargé des célébrations du bicentenaire*.

Selon La Silla Rota, cette addition phénoménale s’expliquerait principalement par la prise en charge de 3.000 nuits d’hôtel et 35.000 repas pour les 130 collaborateurs de Royal de Luxe et le transport de 30 tonnes de matériel de Nantes à Veracruz.
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*  « A Royal de Luxe, quien organizó al aire el espectáculo al aire libre marionetas gigantes en Guadalajara, se le pagaron 88 millones 667 mil 360 pesos descontando el IVA, por medio de Turissste. »

Bouchons publics

Tout débat sur la circulation à Nantes appelle une foultitude de commentaires. Celui lancé par Presse Océan ces jours-ci n'a pas fait exception. Il est clair que, sur ce plan, le bilan de vingt ans de municipalité de Jean-Marc Ayrault n'est pas brillant. Il faut dire que la fonction publique n'a pas aidé.

L'évaluation du Plan de déplacements urbains 2008-2010 de Nantes Métropole est avant tout un exercice d’auto-célébration, mais on y lit quand même des choses intéressantes. Par exemple ceci : « Quand le stationnement est contraint, sur le lieu de travail, 67 % des salariés utilisent un mode de transport alternatif à la voiture. Quand le stationnement est facile, ils ne sont plus que 32 %. »

Traduction : les employeurs qui offrent un parking à leurs salariés aggravent les difficultés de circulation en mettant dans les rues un nombre de voitures supplémentaires égal à 35 % de leur effectif (67 % - 32 %).

Des noms ! Des noms ! Des noms ? Eh ! bien, pour le centre-ville, Nantes Métropole, la ville de Nantes, la préfecture de Loire-Atlantique, le département, le centre des impôts, le CHU, le rectorat, le palais de justice, etc. (tous pourtant situés à proximité immédiate d’une ligne de tramway). Bref, à en croire Nantes Métropole, l'un des principaux facteurs d'aggravation des bouchons pourrait bien être la forte augmentation du nombre de fonctionnaires ayant accès à un parking dans Nantes depuis vingt ans !

11 novembre 2010

Un cœur tendre, qui hait le néon maigre et bleu

Sale temps cet après-midi ! Sur l’île de Nantes, les palmiers déplumés du Jardin des voyages dégoulinent lamentablement. L’Éléphant se tient rencoigné au plus sombre des Nefs pour échapper aux rafales et subir quelque réparation. On se hâte sous les parapluies. Seule De temps en temps, l’œuvre lumineuse de François Morellet, délivre un message d’espoir : elle annonce un temps simplement nuageux.
 
Peut-être était-ce seulement un court-circuit ou un bug dans le système de contrôle ? Quelques instants plus tard, la météo reprend ses droits : les néons se sont remis à la pluie. Et tant pis pour qui, passant par là au mauvais moment, aura cru pouvoir sortir sans riflard.
Mais apparaît alors une autre limite de l’œuvre. Pour l’Angevin Morellet, sans doute, la pluie, c’est la pluie. Pour nous Bretons, il existe au moins une demi-douzaine de pluies différentes. Les quelques rayures bleues affichées par De temps en temps représentent bien mal les cataractes d’aujourd’hui. Et guère mieux le crachin d’autres fois.

Quant au vent, dimension essentielle de nos climats, la façade d’Harmonie Atlantique l’ignore totalement. Ce n’est pas pour rien qu’on qualifie Morellet d’artiste « minimaliste ».

Machines de l'île : un déficit pérennisé

« Peut-être que le Manège des mondes marins tournera mieux avec 10 millions d’euros au lieu de 6,4 ? », conjecture un lecteur de ce blog au vu du précédent billet.

Peut-être… Toujours est-il que Nantes Métropole n’y croit guère.

Avant l’ouverture des Machines de l’île, la communauté urbaine avait voté 800.000 euros de subventions d’exploitation, dont 500.000 euros pour la première année. Les Machines devaient « tendre vers l’équilibre » à partir de 2009. On sait ce qu’il en advint : il a fallu allonger la sauce pour éviter la cessation de paiement.

Les choses vont-elles aller en s’améliorant ? Elles n'en prennent pas le chemin. En renouvelant cette année jusqu’en 2025 (!) la délégation de service public accordée à Nantes Culture et Patrimoine, Nantes Métropole a prévu de lui verser une subvention annuelle définie « en fonction du déficit estimé dans le compte d’exploitation prévisionnel ». Cet équipement qui aurait dû rapporter de l’argent va donc continuer à en coûter.

Et même de plus en plus : pour 2011, la subvention s’élève à 1.100.000 euros. C’est-à-dire que chaque visiteur des Machines sera subventionné par les contribuables de l’agglomération nantaise à hauteur de 3 ou 4 euros. Merci qui ?

10 novembre 2010

Les cordons de la bourse mieux tenus à Paris qu’à Nantes

Jean-Marc Ayrault prône la rigueur financière. Selon le blog Bluetouff (http://bluetouff.com/2010/11/10/hadopi-ayrault/), il a adressé hier au nom de son groupe parlementaire un courrier virulent à la présidente de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI). Entre autres rouspétances, il s’offusque du dérapage budgétaire de celle-ci : « 12 millions d’euros ont été demandés pour le fonctionnement de la HADOPI dans le projet de loi de finances pour 2011 alors que, lors des débats parlementaires, c’est un budget de 6,7 millions d’euros qui avait été annoncé ».

Le président du groupe socialiste pourrait donner des leçons à celui de Nantes Métropole. Le conseil de la communauté urbaine a voté en juin dernier un budget de 10 millions d’euros pour la réalisation du Manège des mondes marins « alors que lors des débats communautaires*, c’est un budget de 6,4 millions d’euros qui avait été annoncé » !

Nantes Métropole a aussi voté un budget de 6,9 millions d’euros pour un Mémorial à l’abolition de l’esclavage dont le coût annoncé était de 4,2 millions en 2005 et 100.000 euros quand la décision a été prise, en 1998.
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* Pas seulement un débat, d’ailleurs : le montant de 6,4 millions d’euros avait été acté par un vote de Nantes Métropole le 26 octobre 2007.

09 novembre 2010

Coup de chaud sur la palette

En fait de détritus, la Villa Déchets en construction sur l’île de Nantes utilise surtout des palettes en bois, moins difficiles à recycler que des couches-culottes usagées. Il lui en faut 800. « La palette est l’une des inventions majeures du 20ème siècle car elle a révolutionné la manutention des produits », affirmait déjà Jean de Vulliod, le gourou mondial de la palette fondateur de la place de marché Planetpal.net. Va-t-elle aussi révolutionner l’architecture au 21ème siècle ?

Et ce n’est pas tout : la palette joue aussi un rôle dans… la formation professionnelle des pompiers. Le service départemental d’incendie et de secours de Loire-Atlantique (SDIS 44) vient de lancer un appel d’offres pour des fournitures de bois à brûler, comprenant des panneaux d’aggloméré et des palettes. Décidément, le marché local de la palette risque la surchauffe.

06 novembre 2010

L’Éléphant écrase les chiffres, une fois de plus

Dès qu’il est question des Machines de l’île, on dirait que les calculettes tombent en panne. « L’Éléphant fait complet quasiment tous les jours de l’année », assure ce matin Presse Océan.

Que disent les chiffres ?  L’Éléphant a transporté 55.000 passagers en 2009. Si vraiment il « faisait complet », à raison d’environ 1.750 trajets par an, il en aurait transporté au moins 85.000, soit 54,5 % de plus !

Le problème de l’éléphant, c’est sa totale absence de flexibilité à l’égard de son marché. Qu’il y ait foule ou non, il ne peut transporter que quarante-neuf passagers à la fois. Tantôt il manque des ventes, tantôt il circule quasiment à vide, avec des frais de personnel et de fonctionnement pourtant identiques.

Tout n’est pas perdu : une partie des visiteurs qui n’ont pu accéder à l’Éléphant achètent quand même un billet pour la galerie des machines. Reste à savoir combien de fois on peut leur faire le coup avant qu’ils ne se lassent.

Les Machines ne manquent pas de qualités esthétiques. C’est leur concept qui est mauvais. Pour un « équipement touristique structurant », leur yield management est consternant. Leur problème commercial découle en grande partie d’une faiblesse technique de l’Éléphant. Dans le projet initialement présenté, il devait faire le trajet des Nefs à la grue Titan et retour à raison de 30 minutes par tournée. Dans la réalité, il lui faut près de trois quarts d’heure pour accomplir le parcours dans un seul sens. Résultat : un tiers de passagers en moins dans les périodes où il affiche complet.

Nantes Métropole, qui avait sans doute mal bordé son contrat, s’est laissé refiler un tacot, payé au prix fort et qui continue à consommer des subventions publiques alors qu'il aurait dû être bénéficiaire. Heureusement que sa communication est plus efficace que sa tringlerie.